LES BIJOUX NAPOLEON III
un reflet de l’éclectisme et du faste (1850-1890)
La seconde moitié du XIXe siècle, et en particulier le Second Empire (1852-1870), est une période d’effervescence culturelle et artistique. Les bijoux de cette époque reflètent parfaitement cet esprit, caractérisé par un éclectisme prononcé, un goût pour le faste et une inspiration puisée dans les styles du passé.

Un contexte économique et social favorable
Le XIXe siècle voit l’industrie européenne et américaine prospérer, entraînant l’enrichissement de nouveaux hommes d’affaires et banquiers européens, qui viennent s’ajouter à l’ancienne aristocratie. Parallèlement se développent, à partir des années 1850, une période de paix et de croissance économique. Dès lors, les cercles sociaux affichent leur réussite, et le succès d’un homme d’affaires se mesure souvent au nombre de bijoux portés par son épouse. En Europe, les sociétés de cour, avec des monarques encourageant la splendeur, contribuent également à cette effervescence. Apparaissent alors la mode des bijoux Napoléon III.
L’influence de la cour impériale :
La cour de France, sous le règne de Napoléon III et de l’impératrice Eugénie de Montijo, en est le parfait exemple. Leur mariage en 1853 marque le début d’une période de bals, dîners et concerts somptueux. Des bijoux de la couronne de France, Napoléon III fait de nouvelles parures pour la nouvelle impératrice. De plus, les expositions universelles présentent ces merveilles et mettent en lumière le génie des grands joailliers qui répondent aux commandes royales, tels que Fossin, Morel, Lemmonier, Krammer ou Bapst puis Chaumet.


Une succession de styles éclectiques :
Les bijoux Napoléon III présentent une grande diversité de styles. En effet, la première moitié du XIXe siècle s’imprègne encore fortement du goût du XVIIIe siècle et l’historicisme. Cependant, à partir des années 1850, de nouvelles découvertes et l’influence de l’impératrice Eugénie font évoluer considérablement les bijoux.
L’influence déterminante de l’impératrice Eugénie :
L’impératrice Eugénie a exercé une influence considérable sur la mode et les bijoux de son temps. Connue pour son goût raffiné et son amour des bijoux anciens, notamment ceux du XVIIIe siècle, elle a contribué à populariser certains styles et matériaux, comme les perles fines et les diamants taille rose. On peut noter sur les deux tableaux ci-dessous, son goût prononcé pour les perles.


Les caractéristiques des bijoux Napoléon III :
Éclectisme stylistique :
Les bijoux Napoléon III puisent leur inspiration dans diverses époques : le XVIIIe siècle (notamment le style Louis XVI, très apprécié par l’impératrice Eugénie, qui admirait Marie-Antoinette et s’inspira largement des motifs à rubans et guirlandes de la reine), la Renaissance, l’Antiquité (notamment à partir de 1862, lorsque Napoléon III rachète une partie de la joaillerie antique de l’importante collection Campana, exposée ensuite au Louvre, comprenant des pièces grecques, romaines et étrusques), et même l’Orient. Ce mélange des genres crée des pièces originales et souvent très ornées.


© Les Arts Décoratifs / photo : Jean Tholance
Matériaux :
L’or jaune est prédominant, souvent associé à l’or rose. L’argent est moins utilisé, sauf en combinaison avec l’or. L’émail venait également souvent rehausser l’or. De couleur, pour les bijoux sentimentaux ou noir pour les bijoux dits de deuil. Les pierres précieuses les plus courantes sont les diamants (souvent taillés en rose), les perles fines (très à la mode), les émeraudes, les rubis, les saphirs et les grenats. On trouve également des pierres semi-précieuses comme l’améthyste, la turquoise, le corail, l’onyx et l’agate.


Motifs et thèmes :
- Naturalisme : Les motifs floraux tels que les fleurs de jasmin, les feuilles de châtaignier, le lierre et les groseilles, et les motifs animaliers (oiseaux, insectes) sont très présents, témoignant d’un goût prononcé pour la nature. Comme en témoigne notre image de couverture, cette très belle broche Plume de Paon commandée par l’impératrice Eugénie à la Maison Mellerio à vers les années 1865.
- Motifs célestes : Les étoiles et les croissants de lune, très populaires, ornent tant les diadèmes que les broches, qui peuvent même se transformer en bijoux de cheveux.
- Symbolisme : Les bijoux portent des inscriptions, des symboles (cœurs, ancres, croix) ou des éléments rappelant la personne à qui ils sont destinés (cheveux, parfois même des dents dans les bijoux de deuil).
- Influences historiques : Les camées, inspirés de l’Antiquité, sont très populaires. Sculptés dans des pierres dures comme l’onyx, la cornaline ou l’agate, ou dans des coquillages, ils font revivre les mythes antiques.


Types de bijoux :
- Parures : Les femmes portaient des parures complètes, composées de diadèmes, colliers, boucles d’oreilles, bracelets et broches. Cependant, si les diadèmes étaient courants sous l’Empire, avec la défaite de 1870 et la IIIe République, ces bijoux deviennent trop ostentatoires. On leur préfère alors les aigrettes agrémentées de plumes ou les peignes.
- Bagues : Les bagues étaient très variées, avec des motifs floraux, des chatons importants et des pierres précieuses.
- Broches : Les broches étaient très populaires, souvent ornées de motifs complexes et de pierres précieuses. Elles se transformaient également pour devenir des bijoux de corsage ou de cheveux.
- Boucles d’oreilles : Les boucles d’oreilles étaient souvent longues et pendantes, ornées de perles et de pierres précieuses.
- Bijoux de deuil : Suite au décès du prince Albert en 1861, la mode des bijoux de deuil se répand. Ils sont souvent en or, agrémenté d’émail noir, d’onyx ou de jais, parfois ornés de perles ou de cheveux.
- Bijoux de sentiment : Cette période voit également l’essor des bijoux offerts pour marquer les sentiments. Il peut s’agir de bijoux à messages gravés, ciselés ou émaillés. Ou bien d’objets symboliques, souvenirs d’une histoire personnelle entre deux amants. L’empereur Napoléon III lui-même était très friand de ces bijoux pour l’impératrice. Il lui offrit notamment des bijoux en trèfle en souvenir d’une promenade au Louvre avant leurs fiançailles.
Techniques de joaillerie :
Les techniques de joaillerie de l’époque sont très élaborées, avec un travail minutieux de l’or (ciselage, granulation, filigrane) et des sertissages complexes. Au début, les motifs sont libres, puis, à partir des années 1860, ils sont davantage enfermés dans des cadres plus symétriques ou des bandeaux, notamment pour les diadèmes.


L’essor du diamant et de la perle :
Les plus riches dames de la haute société aspiraient à porter des diamants, à l’instar de l’impératrice Eugénie. Or, on découvre de nouvelles mines en 1867 en Afrique du Sud, ce qui apporte de nouvelles pierres sur le marché. De plus, les nouveaux éclairages électriques magnifient l’éclat et la brillance de ces gemmes. Par ailleurs, les perles sont également à l’honneur, qu’elles soient noires, grises, blanches, rondes, poires ou gouttes. Pour Joseph Chaumet, créateur des diadèmes de toute la haute société, la perle est le raffinement ultime, quelle que soit sa couleur ou sa forme.
Les bijoux victoriens
L’appellation « bijoux Napoléon III » est principalement utilisée pour les créations joaillières françaises. Il va sans dire que les autres cours européennes et mondiales ont également eu leurs propres créations durant cette période. En Angleterre, les bijoux de cette époque sont appelés « victoriens » en souvenir de la reine Victoria, dont le règne s’étendit de 1837 à 1901. La période victorienne est donc plus longue : elle commence plus tôt et se termine plus tard que le Second Empire français. Si les bijoux présentent des similitudes, les cours et les artistes s’influençant mutuellement, quelques spécificités sont à noter.
- Tout d’abord, c’est à la reine Victoria que l’on doit l’utilisation prononcée et répétée du noir dans la joaillerie. En effet, en 1861, elle devint veuve du prince Albert et décida dès lors de porter le deuil complet et de ne porter que du noir. L’émail noir, l’onyx et le jais devinrent alors les matériaux privilégiés des joailliers pour ce qui fut appelé les bijoux de deuil.
- Les perles étaient également portées en signe de deuil par les monarques anglais.
- Enfin, le commerce anglais avec l’Inde permit l’importation de nombreux diamants, ce qui permit aux Anglais de se parer avec magnificence.
- Cependant, à partir des années 1880, les bijoux devinrent plus simples, avec l’utilisation de grenats et d’or, souvent 9 carats. Ils se démocratisèrent et furent portés plus volontiers. Une nouvelle génération rêvait de s’éloigner de la tristesse de la fin du règne de la reine Victoria, et cela se refléta dans les bijoux.
En conclusion :
Les bijoux de l’époque Napoléon III témoignent de la richesse et de la diversité artistique du Second Empire. Ils se caractérisent par un mélange de styles, une grande variété de matériaux et de motifs, ainsi qu’un savoir-faire exceptionnel. Ce sont des pièces de collection très recherchées aujourd’hui, témoins d’une époque fastueuse et raffinée.
Notre sélection de bijoux Napoléon III
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